Vacances express

J’ai déjà eu l’occasion de le dire, mais l’avantage de vivre ici (Le Trégor, Côtes d’Armor, Bretagne, France, Europe, Terre, Voix Lactée), c’est que l’on peut se mettre en vacances pour deux heures; il suffit de passer sa porte. Ou de rentrer par le chemin des écoliers après un rendez-vous. C’est ainsi que votre servante fit l’autre jour un détour par sa vallée des Traouiero natale. (Je mets en lien une page dont je n’ai pas la moindre idée de la provenance, son auteur ne se présentant pas: mais elle m’a paru tout-à-fait appropriée. S’il s’avère qu’elle émane d’un activiste satanique néonazi, je corrigerai. Mais ça m’étonnerait.)

Le cœur est ainsi fait: j’admets que le monde est beau, vaste et divers, que Venise doit valoir le détour, que le Yellowstone n’est pas un parc de manchot, et même que la forêt de Rambouillet mérite d’exister. Mais chaque fois que je redescends dans MA vallée, celle qui a vu défiler (sans s’en émouvoir outre mesure) mes grands scénarios d’enfant, mon ennui d’adolescente, et même quelques-uns des mes (vrais et faux) pas de soi-disant adulte… Crénom. C’est là.

Oh, je sais à présent que c’est un mouchoir de poche, que la forêt ancestrale qui faisait fantasmer mes quinze ans celtomanes n’a en réalité qu’un tout petit siècle (les talus qui la quadrillent en témoignent); et puis la “mise en valeur du site”, avec ses passerelles en bois et ses signalétiques, a mis fin à cette impression que nous avions, nous les (jeunes) riverains, d’être à la fois découvreurs et propriétaires d’un monde inexploré. Traverser le ruisseau (1,5m de large à la saison humide) sur un tronc d’arbre moussu, ça, c’était l’aventure!

N’empêche. Les énormes blocs de granit en équilibre inexplicable; les arbres que rien n’empêche de pousser, pas même la pierre que leurs racines enlacent comme de jeunes muscles; les scolopendres, les iris d’eau, l’ombre de midi criblée de fins rais verticaux, les vipères que l’on effraie en tapant fort du pied, l’odeur de feuille et de boue… Toutes les autres merveilles que je verrai dans ma vie procèderont de celle-là.


(Et le Travail, dans tout ça, hein? Vocalises, révisions, écriture, transcriptions, ça se fait tout seul, peut-être? Oui, bon, on y va… Mais il n’y a pas que la musique dans la vie. D’abord.)