Musicophilia 1: la musique par la face Nord

Musicophilia, c’est le fascinant bouquin que le neurologue Oliver Sacks a consacré à la façon dont notre cerveau conçoit, reçoit et interprète la musique. La trame de l’ouvrage est une ahurissante (et pour un musicien, franchement terrifiante) collection de dysfonctionnements individuels, qui mettent en lumière chacun un aspect de la place que prend la musique dans nos ciboulots, et révèlent la délicatesse, la précision et parfois la résilience de l’extraordinaire horlogerie qui nous permet d’inventer et d’apprécier une gavotte, un concerto, et même (si, si, du point de vue neurologique ça ne doit pas être si différent que ça) Petit Papa Noël.


J’ignorais que pour bon nombre de gens la surdité, loin de se traduire par le silence, engendrait au contraire des hallucinations musicales incessantes. Je ne savais pas qu’un traumatisme pouvait priver quelqu’un non de l’ouïe mais de la capacité à entendre un accord (l’écoute d’un orchestre devenant «comme un tas de voix qui parleraient simultanément»); qu’il existe une forme de handicap mental, le syndrome de Williams, qui se traduit par un QI très bas mais aussi par une extraordinaire ouverture à autrui doublée d’une sensibilité extrême à la musique… Et même sur des sujets plus familiers – l’oreille absolue, les différents types de dons musicaux, les déformations auditives chez les musiciens – , l’approche neurologique est toujours riche d’informations… et de questions nouvelles. Comment cela fonctionne-t-il dans ma tête à moi? Tel point évoqué se traduirait-il de la même façon dans une autre musique que la musique occidentale qui est au cœur de l’ouvrage? Suis-je d’accord avec telle affirmation d’ordre plus subjectif?


Bref, lecture stimulante – en plus d’être fort agréable car Mr Sacks raconte à merveille, et qu’il s’agit véritablement d’un ouvrage de vulgarisation destiné aux simples mortels dans mon genre. Ce qui permet à l’auteur de nous offrir bon nombre de très belles histoires, touchantes et nourrissantes en elles-mêmes. Deux petits exemples dans le courrier suivant.