Mémoire, musique et hygiène corporelle

Et hop! Avant de replonger gaillardement dans le nouveau spectacle (ce week-end à Yffiniac et Laurénan, cf courrier précédent), quatre jours de répétitions avec Mélisme(s) – l’ensemble vocal fondé par Gildas Pungier, chef des chœurs à l’Opéra de Rennes. (J’aurai l’occasion, sans tarder, de reparler plus longuement de Mélisme(s), où je goûte, moi l’incurable singletonne, aux joies insoupçonnées d’être petite partie dans un passionnant tout.) Répétitions, donc, d’un programme Ladmirault (compositeur breton du XXe siècle), en vue de concerts et d’un enregistrement cet automne. Et la petite mécanique cérébrale de l’apprentissage se met en branle, merveilleusement, une fois de plus…

Evidemment, être musicien c’est mémoriser sans fin, passer sa vie à acquérir de nouveaux réflexes. Les périodes de travail intense comme celle-ci ont ceci d’amusant qu’elles mettent en lumière ces processus. C’est ainsi qu’on se retrouve, à toute heure du jour et de la nuit et quelle que soit l’occupation en cours, à réentendre mentalement le programme entier – sans s’en rendre compte la plupart du temps: une tâche de fond dans l’ordinateur. A peine s’aperçoit-on parfois que la bande-son change de minute en minute: ce n’est pas qu’on a un air dans la tête, c’est que le cerveau, en douce, se repasse tout le film! Et ce avec un sens de l’à-propos qui peut devenir assez réjouissant: je me suis ainsi déjà vue prendre ma douche en sifflotant un Agnus Dei grégorien du XIe siècle, et faire de la confiture d’abricots avec le Dies Irae de Mozart en fond sonore intérieur… Quant à mon brossage de dents de ce soir, il a toutes les chances d’être accompagné d’une chanson populaire pour chœur mixte à quatre voix et piano. On sous-estime souvent l’importance de la salle de bain dans la maturation de l’acte artistique.